Au cœur de la cité minière de Crusnes (Meurthe-et-Moselle), l’église classée Monument historique est un modèle unique en Europe : elle est en fer. Après des années de restauration, elle a retrouvé son aspect d’origine.
L'église Sainte-Barbe avant restauration
L’église de Crusnes-Cités présente le cas exemplaire d’un patrimoine original qui a failli disparaître à la suite de la fermeture des mines et qui a été sauvé grâce à la ténacité de ses habitants. Elle s’inscrit dans l’histoire passionnante de l’architecture métallique.
Notre itinéraire commence sur la place de Crusnes, au cœur des cités construites par les De Wendel à partir de 1912. L’église prévue dans l’axe central n’a pas eu le temps d’être édifiée avant la guerre. La salle des fêtes située sur la gauche servait de lieu de culte. La crise de 1929 a retardé encore le projet. En 1938, les De Wendel décident la construction à leurs frais d’une église d’un type original, entièrement en fer.
Cet édifice a été réalisé par la société Fillod. Ferdinand Fillod, originaire du Jura, dépose à partir de 1928 plusieurs brevets d’invention pour un système de maisons préfabriquées en acier. Dès 1929, il s’installe en Moselle et s’associe avec De Wendel. Dans les années 30, Fillod cherche à s’implanter sur le marché colonial et projette de construire des églises bien isolées, facilement transportables, pouvant être assemblées par une main-d’œuvre non spécialisée. L’église de Crusnes est un prototype.
L'église de Crusnes restaurée
Le bâtiment a été monté en moins d’un an, en 1938-1939. On a d’abord monté une armature métallique. L’élément de base des murs est un panneau de tôle fine de 6 mètres de haut, plié et assemblé sans boulon ni soudure. Le mur est constitué de deux parois parallèles entre lesquelles est intercalé un matériau isolant : du laitier de haut fourneau. Chaque panneau devient ainsi un véritable mur porteur. Le toit plat est lui-même métallique. Ainsi, la totalité des matériaux provient du bassin sidérurgique. On retrouve ici le style Art Déco dans les trois volumes de la nef et des bas-côtés, le dessin des ouvertures et la frise sommitale. La Seconde Guerre mondiale va empêcher l’exploitation de ce procédé. L’église Sainte-Barbe est un exemplaire unique dans le monde.
L’église est touchée en 1940 par des tirs provenant de la ligne Maginot ; l’eau commence à s’infiltrer. Après la fermeture de la mine, le bâtiment est cédé à l’association diocésaine de Nancy. Les dommages s’amplifient. En 1977, à la suite d’un affaissement, l’église s’enfonce d’un seul coup de 72 cm.
En 1988, une paroissienne, Georgette Lecomte, fille et veuve de mineur, alerte les médias. Des professionnels de la construction métallique mettent gracieusement l’édifice hors d’eau. Leur action enclenche une prise de conscience qui aboutit au classement en 1990. L’association des Amis de Sainte-Barbe est créée en 1996 pour collecter des fonds en vue de la restauration. Le chantier commence l’année suivante. Les tôles extérieures sont neuves. A l’intérieur, les panneaux d’origine ont été décapés. Le laitier a été remplacé par la laine de roche. La façade a retrouvé ses couleurs d’origine en 2006. Mais, à l’intérieur, les travaux ne sont pas encore finis…
Pour visiter l’église Sainte-Barbe, s’adresser à Serge Forcellini, président de l’association des Amis de Sainte-Barbe au 03 82 89 39 54.