Chaque 15 janvier, la paroisse de Bleurville fête traditionnellement son second patron : saint Maur. Qui semble bien oublié aujourd’hui… Le président de l’association de sauvegarde de l’ancienne abbaye bénédictine du village, nous en rappelle l’histoire.
> Rappelez-nous la genèse du culte de saint Maur à Bleurville ?
Depuis la dédicace de l’abbatiale du monastère bénédictin du village à saint Maur en 1050, ce bénédictin disciple de saint Benoît fut considéré comme le patron principal de la paroisse avant d'être supplanté par saint Pierre, patron de l'église paroissiale à partir du XVe siècle. Saint Maur sera fêté en même temps que les deux martyrs comtois du VIIIe siècle protecteurs du monastère bénédictin, Bathaire et Attalein, chaque 15 janvier jusque dans les années 1990. Le pape Léon IX, en consacrant l'abbatiale, a voulu donné aux bénédictines de Bleurville un saint de l'ordre à vénérer. Il devait être un exemple de spiritualité pour la communauté naissante.
> Quel fut son développement jusqu’à nos jours ?
Le culte de saint Maur resta vivace jusqu’à la fin du XXe siècle. Entre la fin du XVIIe et le XVIIIe siècle, les archives nous apprennent que chaque 15 janvier, la messe rassemblait une foule considérable venue des paroisses voisines : les fidèles attribuaient au saint un véritable pouvoir de guérison. Au moment de la fermeture du monastère en 1790, de nombreuses béquilles étaient encore accrochées dans le chœur de l’église, témoignant ainsi de la grande vénération dont bénéficiait notre saint guérisseur en cette fin du XVIIIe siècle. La fête de saint Maur connut encore de grands moments au XIXe siècle avec la création de nouveaux reliquaires, et dans les années 1920-1930 à l’époque de l'abbé Paul Idoux qui redonna tout son lustre à cette fête religieuse en organisant des messes solennelles présidées par l'évêque de Saint-Dié. Lors de la messe dominicale, le prêtre proposait à la vénération des fidèles les reliques des martyrs Bathaire et Attalein – Bleurville n’a jamais possédé de reliques de saint Maur.
La fête religieuse avait ses prolongements profanes : le repas qui rassemblait la famille au cœur de l’hiver, et, jusqu'à la fin des années 1970, un bal réunissait à la salle des fêtes – puis sous bal monté par la famille Rollin – la jeunesse du village. Et puis, progressivement, les traces de la fête ont disparu : le bal tout d'abord, puis le repas familial et enfin la messe dominicale…
> Alors, saint Maur aujourd’hui à Bleurville ?
Si les aspects religieux et profanes ont disparu, il n'empêche que le souvenir de saint Maur demeure vivace dans le village en raison de la présence de l'ancienne abbatiale bénédictine qui lui est consacrée ainsi que la présence de sa statue à l'église paroissiale. Saint Maur demeure officiellement le second patron de la paroisse ; c'est le fruit de l'histoire du village et de la foi des générations qui nous ont précédés. Quoi qu’il en soit, l'association des Amis de Saint-Maur entend entretenir le souvenir de saint Maur en poursuivant l’animation de l'ancienne abbaye. Et peut-être peut-on espérer connaître un jour à nouveau une messe à l’occasion de la Saint Maur… Pour que saint Maur ne soit pas définitivement mort. ♦