Henri Poincaré, dont on célèbre cette année le 100e anniversaire de sa disparition, fut probablement l'un des derniers grands savants universels. Mathématicien, physicien, philosophe, on lui doit des contributions essentielles dans ces domaines et, notamment, dans la théorie de la relativité restreinte. En philosophie, ses ouvrages rencontrèrent un vif succès auprès du grand public et exercèrent une profonde influence sur les épistémologues du XXe siècle.
Cent ans après sa mort, son oeuvre reste encore vivace et suscite toujours de nombreux développements. Cependant, si l'on exclut les notices et éloges publiées juste après sa mort ou les textes d'hommage rassemblés lors de la célébration du centenaire de sa naissance en 1954, les ouvrages biographiques sur Henri Poincaré demeurent rares.
Ce livre vient combler un manque dans ce domaine. En 1913, Aline Boutroux, soeur d'Henri Poincaré et épouse du philosophe Emile Boutroux, rédigea ses souvenirs de jeunesse, sous le titre Vingt ans de ma vie, simple vérité. Ce texte est demeuré inédit jusqu'à aujourd'hui, circulant seulement dans un cercle familial ou chez les spécialistes de Poincaré. Bien qu'il ne s'agisse pas à strictement parler d'une biographie d'Henri Poincaré, ce texte relate les années de jeunesse et de formation du mathématicien à Nancy puis à Paris jusqu'à la fin des années 1870. Il offre également de précieux détails sur sa famille, sur son milieu social et culturel, sur les événements qui marquèrent Nancy durant cette période, ainsi que sur son éveil précoce à la pensée philosophique.
Traversé par la chute du Second Empire, la guerre de 1870 et l'installation de la Troisième République, ce récit de vie intéressera tout autant les historiens des sciences que les historiens généralistes et, bien sûr, tous les Lorrains !
‡ Aline Boutroux. Vingt ans de ma vie, simple vérité. La jeunesse d'Henri Poincaré racontée par sa soeur (1854-1878), Laurent Rollet (présenté par), éditions Hermann, 2012, 350 p., ill. (29 €).
Gilbert Mercier a croisé l'arrière-petite-nièce du graveur Jacques Callot alors que, journaliste, il rédigeait une histoire du château de Lunéville, en 1966, à l'occasion du bicentenaire du rattachement de la Lorraine à la France. Françoise de Graffigny y apparaissait au côté de figures plus marquantes : Emilie du Châtelet et Voltaire. Après avoir consacré un livre à Bébé, le nain de Stanislas et un roman biographique à « Madame Voltaire » (Emilie du Châtelet), l'auteur a convaincu son éditeur, Bernard de Fallois, que Madame de Graffigny, bien qu'ancrée dans sa terre lorraine avait vécu une existence tellement romanesque qu'elle pouvait toucher tous les lecteurs.
Il s'est aussi appuyé sur l'ouvrage écrit par Georges Noël, descendant des légataires de Durival, chroniqueur de la cour de Lunéville. Des érudits lorrains lui ont aussi permis de raconter l'existence conjugale de l'infortunée Françoise, plus heureuse avec des amants qu'elle choisissait jeunes, mais surtout en littérature. Ses Lettres d'une Péruvienne, un roman épistolaire, qu'on trouverait, à notre époque, trempé dans de l'eau de rose, lui valurent une notoriété considérable. Gilbert Mercier voit la clé de ce succès dans le mérite de Françoise de Graffigny d'avoir compris que son siècle attendait de la sensibilité et de l'émotion. Elle lui en donna encore avec « Cénie » (« nièce » en verlan), « comédie larmoyante » écrite en hommage à sa nièce Minette, future Madame Helvétius.