La chapelle Sainte-Libaire de Grand (Vosges) constitue une des quatre étapes du martyre de la sainte patronne du village. Les fonds manquent encore pour la restauration de l'église paroissiale.
Tenu à l'écart par les gendarmes, un jeune militant antinucléaire distribue des tracts aux habitants pour dénoncer la candidature de la commune de Grand à l'accueil d'un site de stockage de déchets nucléaires. Venu du Thillot, le manifestant semble bien seul à l'entrée du village... Devant la foule rassemblée aux portes du cimetière, le maire salue la mémoire de Libaire, la sainte patronne du village décapitée au IVe siècle pour avoir osé embrasser la religion chrétienne. « Elle sut résister aux pressions de son entourage, voire même à celles de l'empereur, jusqu'au martyre, le payant de sa vie », rappelle Jean-Louis Mongin. « A cette époque, il était parfois difficile de manifester ses convictions », déplore le préfet des Vosges, Albert Dupuy. A certains égards, cela est apparemment encore vrai de nos jours…
Aux côtés des élus, de l'évêque de Saint-Dié, du curé de la paroisse et du représentant de l'Etat venus inaugurer les travaux de la chapelle Sainte-Libaire qui se dresse au milieu du cimetière du village, les défenseurs du patrimoine et les paroissiens se mêlent en effet aux curieux.
Au pays du célèbre amphithéâtre gallo-romain et de la remarquable mosaïque, la communauté catholique était depuis onze ans contrainte de se réunir dans une ancienne ferme du village ; elle dispose à présent, avec cette chapelle restaurée, d'un véritable lieu de culte. « Mais notre patrimoine, c'est aussi une église dont l'accès est interdit par mesure de sécurité », ajoute le maire en rappelant que la voûte s'est une nouvelle fois effondrée en début d'année. « Ce bel édifice construit sur la mare sacrée des Leuques, nous avons aussi le devoir de le transmettre à nos enfants en lui rendant son intégrité et son fier caractère. »
Depuis quatre ans, la chapelle du XVe siècle - qui constitue une des quatre étapes du martyre de Libaire et sous laquelle serait enseveli le tombeau de la sainte -, a donc été entièrement restaurée : façade, charpente, couverture et aménagement intérieur. « L'accouchement a été très long, mais en voyant la bâtisse, je me dis que l'enfant est magnifique », précise le président du Conseil général, Christian Poncelet, en rappelant que le financement du projet a été rendu possible grâce au classement de la chapelle au titre des Monuments Historiques en 2005.
L'Etat a ainsi pris en charge la moitié des quelque 627.500 € nécessaires ; l'Union européenne et le Conseil général se partageant à parts presque égales l'autre moitié. « Qu'il s'agisse de l'Europe, de la Région ou de la France, tout cet argent ne sort pas de mon porte-monnaie mais du vôtre », ajoute Christian Poncelet. « C'est l'argent du contribuable ! »
Aimable manière de rappeler à la vingtaine d'adhérents de l'association de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine de Grand que les fonds ne tombent pas du ciel. Selon le maire, qui rêve d'y aménager un espace culturel, la restauration de l'église du village coûterait quatre millions d'euros. L’argent pourrait en revanche venir du nucléaire… Et pourquoi pas.
[clichés Est Républicain]