Le château de Lunéville fête à sa manière le 300ème anniversaire de la naissance de François III, fils du duc Léopold et père de Marie-Antoinette.
Chronologique cette exposition. Forcément, pour comprendre ce que fut la vie de François, né à Lunéville, dans le château, et mort à Innsbruck, avec le titre d'empereur. « Pour les Lorrains, il a abandonné son duché. Seuls les historiens contemporains savent combien ce choix fut difficile », précise Thierry Frantz, chargé d'études documentaires qui a monté cette exposition.
Le second des fils de Léopold
François n'était pas destiné à régner. Son frère, Léopold II, étant mort de la variole, c'est à lui qu'est revenu de succéder à son père, le duc Léopold. À la mort de ce dernier en 1729, il vient diriger la Lorraine. « Il règle les affaires courantes puis laisse les rênes à sa mère, Elisabeth-Charlotte », précise Thierry Frantz. François III repart à la cour de Vienne où il a été en partie élevé ; son père et l'empereur Charles VI de Habsbourg, ayant pour projet de le marier avec la fille aînée de ce dernier.
Pendant ce temps, les cours d'Europe complotaient. « Louis XV, marié à Marie, la fille du roi Stanislas, l'ancien roi de Pologne, souhaitait une position plus enviable pour son beau-père, roi déchu, et regardait du côté du duché de Lorraine. De son côté, l'empereur Charles VI qui n'avait que des filles, voulait faire reconnaître le droit de son aînée, Marie-Thérèse, à lui succéder. Il avait promulgué une loi dans ce sens, qu'il souhaitait faire approuver par les autres cours. Et en même temps, Louis XV ne voulait pas que François, duc de Lorraine, qui deviendrait Habsbourg par les liens du mariage, une famille ennemie, vive à la porte de la France. » Échange de bons procédés. « La marge de manœuvre pour François était très réduite : sans son acceptation, la guerre de succession de Pologne aurait pu s'éterniser. »
Son mariage d'amour avec Marie-Thérèse est évoqué dans une salle du musée à l'ambiance intimiste, via l'acte de renonciation signifiant l'abandon de la Lorraine, un document extrait des archives départementales de Meurthe-et-Moselle. « Une clé de l'histoire qui met fin à l'indépendance lorraine depuis des siècles ». Grâce à une projection multimédia, la correspondance entre François III de Lorraine et sa mère évoquant cette union est portée à la connaissance des visiteurs. « Sa mère ne sera pas sans lui rappeler ses devoirs ».
« François III n'a pas trahi son duché », insiste Thierry Frantz. « Il a eu des scrupules à renoncer à la terre de ses ancêtres. Les années 1735-1736 furent terribles pour lui. Il a fait de la dépression. Et subissait des pressions non seulement de sa mère, mais aussi de la part de sa future épouse, Marie-Thérèse et de son futur beau-père Charles VI. »
Sa mère, Élisabeth-Charlotte, lui écrira même qu'il a « coupé la gorge à sa famille » car, en quittant ce duché, sa famille a dû s'exiler. Sa mère et deux de ses sœurs sont ainsi parties dans la principauté de Commercy que la princesse Élisabeth-Charlotte a obtenu de haute lutte.
Père de Marie-Antoinette
De François III duc de Lorraine, il deviendra François II de Toscane, puis François Ier du Saint-Empire romain germanique. " Lorsqu'il a abandonné la Lorraine, il ne l'a fait qu'avec des contreparties ", fait remarquer Thierry Frantz.
L'impressionnant portrait de la famille impériale, prêté par le château de Versailles, est l'une des pièces maîtresse de cette exposition. La petite Marie-Antoinette, alors âgée de deux ans, y est représentée dans un berceau aux côtés de la fratrie : François et Marie-Thérèse auront 16 enfants. Mais seuls douze survivront. « Sans les nombreux prêts du musée lorrain de Nancy, cette exposition n'aurait pu voir le jour », précise Thierry Frantz. Outre cette collaboration, cette présentation s'est enrichie de divers prêts de tableaux, figurines, miniatures et objets du musée de la Chasse et de la Nature à Paris, du musée de Remiremont, des archives départementales et même de musées bruxellois, destin européen oblige.
Caution historique, l'exposition qui ne désemplit pas depuis le premier jour, a été montée avec les conseils de quelques-uns des grands spécialistes de François III : Philippe Martin, professeur d'histoire moderne à l'université Nancy 2, Francine Roze, conservateur en chef du Musée lorrain, François Pupil, professeur émérite d'histoire de l'art, un ancien de Nancy 2 et Annette Laumont, devenue conservateur départemental du Patrimoine.
• Entrée libre. Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h jusqu'au 29 septembre, puis de 14 h à 17 h, jusqu'au 11 novembre.
[d’après L'Est Républicain | 20.08.2008]