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Il y a 100 ans disparaissait le cardinal lorrain Désiré Mathieu

Il y a 100 ans, Maurice Barrès suivait le corbillard emportant le cardinal Mathieu, prélat nancéien atypique qui avait été le confident du pape Léon XIII.

 

cardinal mathieu.jpgErudit, modeste, ironique qu'il était. Atypique cet ecclésiastique qu'adoraient les uns, qui indisposait les autres.

 

Pourtant, rien ne le prédisposait à cette tournure d'esprit mordante : Désiré Mathieu était né en 1839 dans la famille d'un petit brasseur d'Einville-au-Jard, près de Lunéville, dont l’épouse était très croyante. Sa sœur deviendra bénédictine sous le nom de mère Saint-François et directrice du pensionnat de Saint-Nicolas-de-Port. Lui entre au petit séminaire de Pont-à-Mousson, puis au grand séminaire de Nancy.

 

Il s'y fait remarquer par sa vive intelligence, sa finesse et son esprit de repartie qui lui vaut parfois de se mettre en porte-à-faux avec ses supérieurs. Mais l'homme ne changera pas, comme le souligne l’auteur lorrain Emile Badel : « Ironique et piquant envers les injustices et les petitesses de la vie courante (...), ponctuel, méthodique et correct, ni mystique, ni subtil (...), comme il ne se corrigea pas, on essaya de le comprendre et on finit par l'aimer tel quel ».

 

Ordonné prêtre, il est envoyé comme professeur de lettres et d'histoire au petit séminaire ; ce qui lui laisse le temps de rédiger une thèse d'histoire sur « L'ancien régime en Lorraine et en Barrois » qui est publiée en 1879, obtient le prix Gobert de l'Académie Française et sera rééditée quatre fois jusqu'en 1907.

 

Nommé ensuite aumônier d'un couvent de dominicains, il est admis dès 1880 à l'Académie Stanislas. « Sa présence est recherchée partout du fait de sa bonhomie, de sa culture et de sa vivacité d'esprit, sauf à l'évêché de Nancy car Mgr Turinaz n'aime pas qu'une tête dépasse au-dessus des autres. Et Mathieu sera vite favorable au ralliement à la République, alors que son évêque appartient à l'aile monarchiste et intransigeante du clergé », explique l'historien François Roth.

 

Cela n'empêche pas le fils de brasseur d'être très vite « épiscopable ». Après avoir été nommé curé-doyen de Pont-à-Mousson, il est fait évêque d'Angers puis archevêque de Toulouse, où il reçoit la pourpre cardinalice. Léon XIII, avec qui il a des affinités, l'appelle auprès de lui en 1899. Cardinal à la Curie, il multipliera les missions diplomatiques avec loyauté et succès.

 

Continuant à écrire et à rédiger des sermons de haute tenue, il est élu en 1906 à l'Académie Française. Il mourra deux ans plus tard à Londres, le 30 octobre 1908, d'une affection rénale, lors d'un congrès eucharistique et sera enterré en grande pompe au cimetière du Sud de Nancy, ville où il a sa rue aujourd'hui.

 

Tous regretteront alors sa « bonne figure placide », sa silhouette typique vêtue d'une « modeste soutane à queue, aussi noire que ses longs cheveux » et son « gros parapluie », que remarque Marcel Cordier dans « La Lorraine des écrivains ».

 

Proche du pape, le cardinal Mathieu avait su rester simple. Il revenait chaque année à Einville. A un copain qui lui demandait « Maintenant, comment vais-je vous appeler ? », il avait répondu placide : « Appelle-moi Désiré, tout comme autrefois ».

 

 

[d’après l’Est Républicain | 19.11.08]

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